Après avoir pris le ressenti de Julien Menuet, président du VCB, sur la décision de la fédération de déclarer une saison blanche, on a pris quelques nouvelles d’Antoine Michon, coach du VCB.
(interview réalisé dimanche 29 mars)

Salut Antoine, pour commencer, comment ça va tout simplement ?
Et bien écoute je vais bien tout comme ma petite famille. Je suis confiné à Caen où ma femme et ma fille résident. On avait décidé de descendre sur Challans uniquement cet été pour que ma petite puisse finir son année scolaire. Quelque part, j’ai eu la chance de pouvoir remonter et que l’on soit ensemble, tous les 3, confinés dans une petite maison de ville. On n’a pas de jardin mais on peut encore sortir un peu avec la petite. Donc tout va bien malgré tout dans ces moments difficiles.

La fédération vient d’annoncer l’arrêt de la saison et le maintien de chaque équipe dans sa division… Quel est ton sentiment vis-à-vis de cela ?
C’est toujours un sentiment partagé. On se dit que le basket finalement c’est pas grand chose même si pour nous ça représente beaucoup. Donc il faut relativiser, je pense que c’est ça le plus important. Se dire que, aujourd’hui, on ne fait pas quelque chose de « très important ». On a un peu le sentiment d’être inutile… C’est ce que je ressens. On a des gens qui se bagarrent dans les hôpitaux et nous on est là, confinés. On a juste à penser à ce que l’on va manger, ce que l’on va aller chercher au drive, donc voilà… C’est un peu un sentiment partagé.
Par rapport à la n1 et à la fédé, il y a des dirigeants qui prennent des décisions. Ils ont pris une décision et c’était important de ne pas laisser les gens dans le flou. Forcément que certains vont se sentir lésés d’avoir fait une belle saison. C’est sûrement ceux qui vont sentir le plus d’injustice d’ailleurs, de ne pas avoir été au bout. Mais c’est comme ça. Alors ce sera dur à digérer pour quelques équipes mais ce n’est pas rien ce qui arrive. Après, je pense que lorsque les clubs étaient dynamiques, il n’y pas de raison pour qu’ils ne le soient plus. On dit « casser des dynamiques » mais je pense que ça va les renforcer et même peut-être générer des dynamiques chez d’autres. Et plus il y aura de gens dynamiques mieux ça vaudra.
Je crois que tout le monde aura faim de basket la saison prochaine. Il faut essayer de se projeter en essayant de positiver – je ne parle que du basket forcément – Pour le reste, il faut attendre que l’orage passe… C’est une évidence pour tout le monde aujourd’hui. De notre côté au VCB, on en a parlé avec le président, il faut peut-être revoir notre fonctionnement d’échanges, de sponsoring, etc. Ce doit être un moment de réflexion pour les clubs.

On va donc repartir en nm1, très probablement avec un budget fortement revu à la baisse comme beaucoup d’équipes (pour ne pas dire tout le monde)…
Oui alors… il y a beaucoup d’inconnue. D’abord, les clubs vont faire un premier bilan de la saison. Jusqu’au 30 juin, comptablement, on appelle ça l’atterrissage. La fédération va demander à chaque club de dire quel sera le positionnement de chacun au 30 juin. Est-ce que vous serez positifs / négatifs…? En sachant qu’en nationale 1, normalement, les clubs sont dotés de fonds de réserve. Donc ça c’est le 1er point : l’atterrissage.
La deuxième situation, se projeter à n + 1 comme on dit. Ça c’est plus compliqué parce que la période de confinement pour nous est la période où les dirigeants vont solliciter les entreprises et créent ce budget. Là, l’incertitude elle perdure, et elle va perdurer forcément. Aller taper à des portes aujourd’hui en demandant de l’argent pour jouer au basket, ce n’est pas d’actualité… Ça le sera peut-être un peu plus tard, en décalage, mais je pense que c’est ce qui va laisser planer beaucoup d’incertitudes. Maintenant les budgets des clubs, il y a une partie qui vient des recettes ‘public’. Il faut aussi les envisager. J’espère que les gens auront très envie d’aller à la salle Vrignaud après avoir été sevré de basket, entre autre.
En fait, pour les dirigeants des clubs, ça va être d’évaluer ces pertes. De quel ordre vont-elles être…? C’est tout ce qui va se jouer rapidement parce que le marché des joueurs reste, malgré ça, actif. Les joueurs devront, peut-être pour certains, faire des efforts parce que je ne pense pas que les salaires seront revus à la hausse pour la saison prochaine. Mais il y a aussi peut-être la possibilité d’étalement pour les joueurs en imaginant des saisons futures meilleures, financièrement parlant. Ce sont toutes ces négociations-la que je vais entamer à partir de cette semaine.
Mais je ne pense pas qu’il faille noircir les tableaux… Il y a le partenariat privé qui reste complètement aléatoire mais il y a aussi le partenariat public, il y a des recettes propres quand même pour les clubs. Il y a des bases de travail, il y a des pistes. Et puis aussi, on peut penser qu’une fois cette crise sanitaire passée, on peut penser qu’il y aura des entreprises qui repartent, qui soient dynamiques à nouveau et qui ait envie d’avancer aussi. Alors ce sera peut-être décalé dans le temps mais il faut aussi se dire ça. Un budget ça se travaille toute l’année, ce n’est pas seulement pendant 2 mois d’intersaison. Donc il y aura peut-être un travail de fond à faire au coeur de l’hiver.

Il va falloir constituer une équipe compétitive sans trop connaître la physionomie du marché qui sera fondamentalement modifiée aussi…
En ce qui concerne l’équipe que je vais construire (car cette année ce n’était pas une équipe que j’avais construite mais juste coaché) pour moi il y a un critère qui est extrêmement important, voire primordiale, c’est l’envie de jouer dans cette équipe, pour ce club. Ça, pour moi, ça reste fondamentale. Que l’on soit joueur professionnel ou pas, on a envie d’être dans ce groupe, on a envie d’être à Challans, on a envie de jouer en Nationale 1… C’est l’envie qui fait qu’un groupe se soude. Pour moi, c’est fondamentale. A chaque fois que quelqu’un me dit « oui je vais voir », pour moi la réponse elle est déjà dans cette phrase… « Je vais voir » Ça veut dire je vais voir si je ne trouve pas mieux, je vais voir si je ne peux pas aller voir ailleurs, je vais voir si je ne peux pas gagner plus ailleurs… Moi je veux des joueurs qui me disent « oui j’ai envie de jouer à Challans » « Oui j’ai envie de jouer dans cette salle, devant ce public, dans cet endroit qui sent le basket » et pour moi ce sera déjà les premiers critères de recrutement.
La basket c’est un sport collectif. Forcément, quand on en fait un job, il y a des intérêts individuels mais ces intérêts individuels viennent se caler dans un collectif. Ce n’est pas chacun pour soi, c’est tout le monde pour l’équipe. Donc je vais essayer de remettre ça au goût du jour.
Ensuite, j’aimerais aussi que l’équipe ressemble à ce qu’on a envie de mettre en place. Moi je viens là, on est en train de structurer, de travailler sur la formation des jeunes joueurs dans son ensemble. C’est-à-dire que j’ai un rôle un peu plus élargi que celui de l’équipe professionnelle. Donc être capable de montrer qu’on a un ou deux jeunes joueurs que l’on puisse intégrer dans l’équipe pro ça me paraît fondamentale aussi. Parce que si on fait un système de formation  pour qu’il n’y en ait jamais un, finalement ça ne sert pas à grand chose. Intégrer un ou deux jeunes joueurs dans le club c’est quand même bien. Ça montre aussi qu’on laisse des places pour ça au sein de l’effectif. Donc forcément autour, il faut une équipe avec quelques cadres, ça c’est une évidence pour être compétitif à ce niveau.
Cette crise elle touche tout le monde, toutes les strates de la société donc tout le monde sera impacté de la même manière. Donc ce sont des périodes qui permettent de voir les choses différemment, de se projeter aussi différemment, mais ça n’empêche pas d’être ambitieux et d’avoir envie de gagner des matches.

Pour finir, que peut-on se souhaiter en attendant la reprise d’une vie ‘ordinaire’ ?
Finalement, c’est plutôt drôle parce qu’on a l’impression d’être costaud, on se prend pour des vedettes et puis finalement, on se rend compte qu’on n’est pas grand chose. Donc ce qu’on peut se souhaiter c’est tout d’abord une belle santé. On le dit toujours mais ça reste vraiment quelque chose d’important. On s’aperçoit qu’on n’est pas des grosses bêtes, qu’il y a une fragilité. On est face à beaucoup de responsabilités, c’est-à-dire que pendant ce confinement, pendant cette catastrophe sanitaire, tout est balayé. Et cela avec des choses que l’on sait déjà depuis longtemps, c’est bien ça le pire… Que ce soit l’état de nos hôpitaux, notre façon se s’alimenter, de créer, de polluer… Tout ça c’est balayé et ça ressemble à un avertissement. Donc là on a du temps, on est devant notre télé, tout le monde y réfléchit…
Ce que je souhaite évidemment c’est que tout le monde ne soit pas touché et puis qu’un maximum de gens soient sauvés et tirés de cette situation-la mais que, dans un deuxième temps, on ne reparte pas bille en tête parce qu’on a la mémoire courte et que les bonnes résolutions que tout le monde peut se poser en ce moment perdurent. Que les gens ne prennent plus le bagnole pour aller chercher leur baguette à 10m quoi…
Et avant de le dire pour les autres, qu’on le fasse pour soi-même !